Chers frères et sœurs,
Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière (Mt 4, 12-23).
Pour la petite histoire, j’ai compris l’importance de la lumière quand j’étais vicaire à la cathédrale Saint-Etienne. En effet les fenêtres de ma chambre donnaient sur l’impasse de la préfecture. C’était un espace très étroit entre les murs de la cathédrale et l’ancien palais de l’archevêque devenu aujourd’hui la préfecture. Déjà les rayons du soleil ne tombaient jamais directement dans la pièce. En plus mon prédécesseur, qui n’aimait pas les rideaux, a eu la « brillante » idée de coller sur les vitres une sorte de bande plastique qui transformait la fenêtre en miroir pour le regard extérieur. La conséquence de cette fabuleuse invention était que la chambre devenait aussi obscure qu’un cachot. Certes, c’était une belle pièce avec de hauts plafonds, mais le manque de lumière était très difficile à supporter. Pour voir ou trouver quoi que ce soit, il fallait allumer la lumière, même en pleine journée.
Aujourd’hui, quand les gens achètent ou vendent des maisons, ils vérifient l’ensoleillement. De ce point de vue même une très belle demeure ne vaut pas grand-chose si son intérieur reste obscur et étriqué.
Cette sagesse populaire nous la connaissons tous, je ne vous apprends rien de nouveau. Je vous invite toutefois à appliquer cette connaissance des réalités matérielles pour juger les choses spirituelles.
Dans son commentaire de l’évangile d’aujourd’hui (Mt 4, 12-23), Lansperge le chartreux (cela ne s’invente pas comme prénom) qui vécu entre la fin du XVe et le début du XVIe siècle écrit cela :
Le Christ est venu illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort. De quelles ténèbres parlons nous ? Tout ce qui se trouve dans notre intelligence, dans notre volonté ou dans notre mémoire et qui n’est pas Dieu, n’a pas de source en Dieu, autrement tout ceux qui en nous n’est pas à la gloire de Dieu et fait écran entre Dieu et l’âme, est ténèbres. Aussi le Christ ayant en lui la lumière, nous l’a-t-il apportée pour que nous puissions voir nos péchés et haïr nos ténèbres
Frères et sœurs, sans la grâce de Dieu, sans le Christ dans nos cœurs, nous ressemblons beaucoup à ces belles demeures que l’on admire de l’extérieur et qui sentent le renfermé. Quelle différence en effet être en présence de Mère Theresa dont chaque parole est semblable à un rayon de soleil illuminant le cœur et être en présence de beaucoup de puissants de ce monde dont les discours embrouillent l’esprit. Ce n’est pas par hasard que le Seigneur nous dit :
Vous êtes la lumière du monde (Mt 5, 14). Je fais de vous la lumière des nations pour que grâce à vous, mon salut parvienne aux extrémités de la terre (Is 49, 6).
Aussi chaque chrétien a vocation à garder précieusement en lui la lumière du Christ reçue au baptême et renforcée dans la Confirmation.
Cela suppose de se regarder soi-même dans la lumière du Christ. A ce moment là toute l’imperfection de notre âme devient évidente. Comme quand j’allumais la lumière dans ma chambre et me rendais compte qu’il y a des toiles d’araignées dans les coins. Ainsi dans la lumière du Sacrement de la confession on voit toutes ces choses qui doivent être nettoyées, polies, perfectionnées.
Cela suppose aussi d’alimenter en permanence cette lumière. Nous devons être connectés au Christ d’abord par la lecture de la parole de Dieu : c’est la batterie qui alimente sans cesse notre lumière. Ensuite par l’eucharistie la plus fréquente possible : elle est une centrale nucléaire qui donne le courant et la force nécessaire à toute action humaine. Enfin par la prière personnelle que rien ne peut remplacer et qui nous synchronise avec le Cœur Miséricordieux du Christ.
Cela suppose aussi de porter cette lumière au monde. Le Seigneur dit qu’une lampe allumée ne peut pas être cachée sous le boisseau (Mt 5, 15). Il nous faut avoir une vie digne du nom de Chrétiens. C’est à dire une parole bienveillante et constructive, un amour de la vérité, une haine de la discorde et de la division, comme ne cessait de le répéter Saint Paul dans la deuxième lecture. Vous savez que la lumière blanche contient en elle toutes les couleurs. Si on la divise, on aura du rouge, du bleu, du vert etc. Mais si on éclaire une pièce avec du rouge ou du bleu, on aura un éclairage qui déformera la réalité. Les chrétiens doivent à tout prix rester unis afin que la lumière blanche de la Sainte Hostie éclaire l’univers entier.
Cela suppose aussi de demander à la Sainte Vierge Marie, Vierge de la Lumière, venir nous conforter et réconforter, joindre à notre pauvre faible lumière son halogène de la Première en chemin. La consécration personnelle à Marie augmente en nous d’une manière exponentielle la lumière du Christ.
Cela suppose enfin de prier avec insistance nos Anges Gardiens, ces êtres de lumière, leur demandant de veiller en permanence sur nous et de nous éclairer de leur lumière éternelle quand la nôtre faiblit à cause des épreuves.
Je finis avec les paroles de Mère Theresa. Voyageant un jour dans un train et regardant les lignes électriques, elle disait ceci : «
« Souvent vous voyez alignés des fils électriques, petits et gros, neufs et vieux, bon marché et coûteux. Sauf que si et jusqu’à ce que le courant passe, il n’y aura aucune lumière. Le fil c’est vous et moi. Le courant, c’est Dieu. Nous avons le pouvoir de laisser passer le courant à travers nous, de le laisser nous utiliser et de produire la lumière du monde, Jésus ; ou de refuser d’être utilisés et de permettre aux ténèbres de se répandre. La Vierge Marie a été le fil le plus merveilleux. Elle a permis à Dieu de la remplir jusqu’à ras-bord, et ainsi, par son abandon, « Qu’il me soit fait selon Votre Parole », elle est devenue pleine de grâce. Et naturellement, dès qu’elle fut remplie par ce courant, la grâce de Dieu, elle partit en hâte chez Élisabeth raccorder le fil, Jean, au courant Jésus »
Suivons l’exemple de Marie. Laissons la lumière du Christ jaillir en nous et, à travers nous, illuminer le monde.
Abbé Bogdan Velyanyk – Curé